Martin et Eliza André
« On ne peut plus se balader le week-end sans prêter attention aux arbres qui nous entourent ! »
Rien ne laissait présager que la famille André unisse son destin à l’arbre le plus emblématique du Quercy. C’est pourtant le chêne noir, surnom du Chêne pubescent roi des causses, qui les retient dans le Lot depuis une quinzaine d’années : d’abord le père, puis le fils et la fille, tous arrivés dans le département depuis les Petites Antilles.
Tout a commencé avec Philippe, le papa. Il a repris l’idée de fournir du bois pour les bouchots, ces piquets d’élevage pour les moules, pour lesquels les chênes des causses du Quercy, au bois dense et imputrescible, font un matériau de choix. « Il s’est lancé avec une seule commande, raconte son fils Martin. Son premier camion est parti avec trois mois de retard, mais le client, très satisfait, en a redemandé. Il a travaillé au début avec un seul bûcheron, qui est toujours avec nous, il fait partie de la famille ! » Martin et sa soeur Eliza se sont peu à peu immiscés dans l’entreprise paternelle. Lui est d’abord parti vers d’autres horizons professionnels, tandis qu’elle, plus attirée par ce métier dans les bois, devra convaincre son père de la prendre. Elle finira par travailler avec Philippe, et son frère les rejoindra plus tard. Après deux ans aux côtés de leur père avant sa retraite, et une petite période d’incertitude, Eliza et Martin créeront ensemble leur propre entreprise en 2018.
Tous deux se partagent désormais la gestion du « Petit chêne noir » : à lui les clients « à terre », à elle ceux « en mer ». Martin prospecte les parcelles de bois et gère l’équipe de bûcherons : « mon boulot, c’est d’abord se balader. Je dois repérer des arbres de seize centimètres de diamètre, longs de quatre à sept mètres. Je contacte ensuite les propriétaires pour leur acheter les chênes sur pied. Les bouchots, c’est un produit ancré dans l’imaginaire. Quand on cherche du bois, ça suscite l’intérêt des gens ». De son côté, Eliza gère les transports et la logistique, ainsi que l’administratif. « Mais Philippe reste présent, on lui parle régulièrement de l’entreprise », rappellent frère et soeur.
Le Petit chêne noir emploie six bûcherons pour la saison, de septembre à avril, et expédie chaque année une soixantaine de camions sur la côte atlantique, chargés de bois des causses du Lot et de départements environnants. L’entreprise compte parmi la dizaine d’exploitants français dans ce domaine. Parfois, d’autres opportunités de débouchés agrémentent le quotidien : Le Petit chêne noir a fourni les piquets qui portent les panneaux du parc photovoltaïque coopératif de Carayac, près de Figeac. Ailleurs, ce sera pour des terrasses sur pilotis. Eliza et Martin comme leur père sont restés dans le figeacois, dans cet environnement largement boisé qui les fait vivre. Avec un seul inconvénient : « on ne peut plus se balader le week-end sans prêter attention aux arbres qui nous entourent ! »
Texte et photo Christophe Pélaprat - Magazine DireLot